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Obésité

Le poids des préjugés : les conséquences invisibles de la discrimination.

La discrimination des personnes en surpoids ou en situation d’obésité n’est jamais sans conséquence. Chez le patient, elle peut provoquer stress, isolement social ou perte de l’estime de soi. Voilà pourquoi, il faut favoriser la sensibilisation et l’éducation, la bienveillance et l’inclusion.

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En 2020, le monde entier a traversé la pandémie du Covid. Au-delà de la dangerosité du virus, cette épreuve sanitaire a eu des conséquences inattendues. Pendant de nombreux mois, elle a distendu le lien social, créer de l’éloignement et provoquer de la solitude. A cause des confinements à répétition, certaines personnes ont fini par souffrir d’un syndrome d’isolement1. Cependant, cette distanciation sociale imposée n’a pas été une nouveauté pour tout le monde.

Les personnes en situation d’obésité connaissent malheureusement cet esseulement. La stigmatisation contre l’obésité provoque de nombreux effets désastreux sur la santé mentale et physique des personnes aux prises avec l’obésité2.

Le docteur canadien Michael Vallis, psychologue de la santé et professeur agrégé de médecine familiale à l’université Dalhousie, illustre parfaitement l’impact de la discrimination. « Les préjugés contre l’obésité sont tels que les personnes qui vivent avec cette maladie ne se sentent pas en sécurité avec les autres. Ils ont développé des moyens pour éviter de se retrouver dans des endroits où la probabilité d’être confrontés au regard accusateur des autres est élevé. »

« Plus envie de sortir, plus envie de rencontrer les autres… »

Faire ses courses tard le soir, commander ses vêtements en ligne, éviter de prendre l’avion… Les exemples sont légion.

Fanny, une jeune maman, qui a servi de modèle pour la campagne « Les préjugés ne soignent pas l’obésité » lancée par Novo Nordisk en 2022, témoigne de cet isolement social : « Je n’osais plus aller au restaurant, car je savais que je ne rentrerais pas dans les chaises, pareil pour le cinéma. Une fois, je suis entrée dans un fast-food, cela a été catastrophique, j’ai eu droit à des insultes. J’ai encaissé beaucoup de méchancetés, de moqueries, de haine parfois. ».

Stigmatiser, c’est aussi attenter au respect des droits humains

Juger une personne sur sa seule apparence physique, c’est commettre une erreur par méconnaissance de la complexité des facteurs de l’obésité3. L'obésité relève de leviers multiples tels que la génétique, l'environnement, les traumatismes de la vie, les habitudes alimentaires ou le niveau d'activité physique. Stigmatiser, c’est aussi attenter au respect des droits humains, car toute personne mérite d'être traitée avec dignité et respect4. C’est à la fois une question de justice sociale et de santé publique5.

La discrimination envers les personnes en situation peut provoquer de graves conséquences sur l’équilibre psychologique. La stigmatisation peut entraîner un stress chronique et peut contribuer à l'anxiété, à la dépression, à une faible estime de soi. Cette conjonction d’émotions négatives peut rendre encore plus difficile pour elles de prendre des mesures pour améliorer leur santé. En effet, lorsque les personnes en situation d’obésité qui se sentent stigmatisées sont moins enclines à rechercher des soins médicaux appropriés, même pour des problèmes de santé non liés à leur poids.

La suralimentation ou la sédentarité, comme moyen de faire face au stress émotionnel

Autre conséquence négative sur la santé morale ou physique des personnes en situation d’obésité, les mauvaises habitudes alimentaires et l’inactivité. La stigmatisation peut pousser certaines personnes à adopter des comportements malsains pour leur santé, tels que la suralimentation ou la sédentarité, comme moyen de faire face au stress émotionnel.

Ces attitudes peuvent contribuer à l'aggravation de l'obésité d’autant que les personnes en situation d’obésité peuvent avoir tendance à réagir en s’imposant des régimes draconiens. Or, les régimes restrictifs ou drastiques dans le but de perdre du poids rapidement se révèlent le plus souvent inefficaces à long terme et peuvent entraîner des fluctuations de poids, ce qui peut être préjudiciable pour la santé6.

Promouvoir l'éducation et la prévention

Si l’isolement social évoqué par le docteur Michael Vallis accentue le mal-être des personnes en situation d’obésité, la stigmatisation peut aussi entraîner une faible estime de soi et une mauvaise image corporelle. Les personnes qui se sentent mal dans leur peau peuvent avoir moins de confiance en elles pour prendre des mesures positives pour leur santé.
Face à ce constat, des solutions existent. Plutôt que de discriminer, il est préférable de favoriser la pédagogie et la prévention concernant les risques de l'obésité et les moyens de la prévenir ou de la gérer de manière saine7.

Une société plus équitable, plus respectueuse et bienveillante

Plutôt que de blâmer, il convient aussi d’éduquer les jeunes générations au respect des différences, à la promotion du bien-être mental positif, à encourager des choix de vie sains par l’écoute et l’accompagnement8.

L’échange, la compréhension et la pédagogie autour de la question de l’obésité doivent permettre à la société d’élargir la dimension socio-affective de chaque être et de gagner en diversité en favorisant l'inclusion de tous ses membres, indépendamment de leur poids ou de leur apparence.

En éliminant la discrimination, chacun de nous crée un environnement empathique et plus inclusif qui encourage les personnes à atteindre leurs objectifs de santé. Cela permettra d’impulser une prise en charge solidaire des personnes vivant avec l’obésité et de créer une société plus équitable et plus respectueuse. Et surtout, apaisante et bienveillante pour tous ses membres.

Philippe Saint-Clair

Références
  1. Martial Foucault. Crise sanitaire et isolement social. Policy brief #11. Septembre 2020
  2. Rebecca M Puhl, Kelly D Brownell. Confronting and coping with weight stigma: an investigation of overweight and obese adults. Obesity (Silver Spring). 2006 Oct;14(10):1802-15. doi: 10.1038/oby.2006.208.
  3. https://presse.inserm.fr/etude-sur-les-prejuges-lies-a-lobesite-quel-regard-ont-les-francais/66776/
  4. Health and Human Rights in a Changing World. Edited By Michael Grodin, Daniel Tarantola, George Annas, Sofia Gruskin. 1 avril 2013.
  5. Rebecca M. Puhl, PhD and Chelsea A. Heuer, MPH. Obesity Stigma: Important Considerations for Public Health. Am J Public Health. 2010 June; 100(6): 1019–1028. doi: 10.2105/AJPH.2009.159491
  6. Kathryn Rand, Michael Vallis, Megan Aston, Sheri Price, Helena Piccinini-Vallis, Laurene Rehman, Sara F.L. Kirk “It is not the diet; it is the mental part we need help with.” A multilevel analysis of psychological, emotional, and social well-being in obesity. doi.org/10.1080/17482631.2017.1306421
  7. Professeur Martine Laville. Mieux prévenir et prendre en charge l’obésité en France. 2023-001R Avril 2023.
  8. https://www.ameli.fr/assure/sante/themes/surpoids-obesite-adulte/prevention-hygiene-vie - 31.01.2025
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